Ce que Mathieu Kassovitz nous a appris (2/8)
Hello hello !
Si tu n’as pas lu le mail d’hier, je t’invite à le faire avant de t’attaquer à celui-ci.
Je t’y ai présenté les deux premiers pièges dans lesquels beaucoup de créateurs tombent en voulant scaler :
1. Sortir de son sweet spot pour faire « ce qui marche » auprès de la masse
2. Devenir une commodité
Aujourd’hui, passons aux deux pièges suivants contre lesquels je voudrais te mettre en garde :
3. Perdre son authenticité en voulant trop en faire
C’est Mathieu Kassovitz qui passe de La Haine à Babylon A.D.
Avec La Haine, il a créé un film culte, avec une âme, des tripes, qui a marqué toute une génération et dont on parlera encore des décennies plus tard.
– Budget : 3.000.000$.
De l’autre côté, Babylon A.D. est une tentative d’énième blockbuster à l’américaine, qui sera finalement un échec critique et commercial, et est déjà tombé aux oubliettes aujourd’hui.
– Budget : 70.000.000$.
Ce n’est que mon interprétation, mais je pense que ce qui a fait une grosse différence entre la conception de ces deux films, c’est l’intention.
Kassovitz a créé La Haine avec l’intention d’éveiller les consciences et d’avoir un véritable impact. Alors qu’il a créé Babylon A.D avec l’intention d’en faire un succès commercial, ainsi qu’avec le besoin de prouver, à soi-même et au public, qu’il était capable de jouer dans la cour hollywoodienne.
C’est comme ça que je vois les choses. Et pour ramener ça à notre écosystème, c’est ce qui arrive à beaucoup de créateurs sur le web.
Jusqu’à un certain niveau, on fait le truc de manière « artisanale », au feeling, un peu à l’arrache parfois, il faut bien le dire.
Et puis à un moment donné, on se dit que pour aller plus loin, scaler, franchir des paliers, on doit « se professionnaliser ». Faire les choses plus proprement, être plus carré dans notre communication.
Par exemple :
– Passer des vlogs filmés avec ce bon vieil Iphone, à des vidéos professionnelles, enregistrées avec 10k de matos…
– Se mettre à vouvoyer son audience alors qu’on la tutoyait depuis le début…
– Adopter un ton différent, un peu hautain parfois, parce qu’on veut prouver qu’on n’est pas le premier guignol venu…
– Se la jouer inaccessible, ne plus répondre à aucun message / commentaire, pour montrer qu’on n’a pas le temps parce qu’on est devenu quelqu’un d’important…
Cette volonté de devenir « pro » ?
Elle se matérialise de plein de manières très différentes selon les créateurs.
Et ce n’est pas forcément un mauvais moove en soi : on évolue, on apprend, on grandit, et on veut que notre business suive.
Mais le risque est énorme de perdre le côté humain, l’authenticité, le ton, l’énergie qui avaient tellement plu à ton audience jusqu’ici. Et de devenir juste une copie, en moins bien, de tous les Mr et Mme Parfait encostardés qui pullulent dans ta thématique.
Je ne suis pas en train de te dire de faire des vidéos en slobard dans ta cave avec ton Iphone 4 toute ta vie.
Mais là où tu veux vraiment te professionnaliser, c’est sur le fond davantage que sur la forme.
Tu veux trouver l’équilibre parfait entre d’un côté, un fond de plus en plus dense, profond, pertinent…
… et de l’autre une forme qui, certes, évolue avec toi, mais tout en conservant la simplicité et l’authenticité qui ont contribué jusqu’ici à te rendre tellement remarquable et attractif pour tes fans.
Tu ne veux en aucun cas devenir fade, plat, remplaçable.
Tu veux au contraire, continuer de faire transpirer ta personnalité, ton âme, ton unicité et tes imperfections dans ton travail.
(Spoiler alert : cet équilibre est beaucoup plus facile à trouver en théorie qu’en pratique)
Et ce, même quand tu grossis.
En fait, on a l’impression qu’on ne peut pas s’adresser aux gens de la même manière, selon qu’ils sont 100, ou 1.000, ou 10.000, ou 100.000, ou 1.000.000 à nous suivre.
Mais 1.000.000 de personnes, ce n’est jamais qu’un million de fois une personne. Et si tu as su attirer une personne avec une certaine identité, tu n’as pas besoin de te transformer pour en attirer un million (si c’est ce que tu veux)…
Tu me suis ?
4. Trahir les valeurs de sa marque
Pour arriver à un certain niveau, tu as bâti une marque avec ses valeurs, sa philosophie et ses limites.
Tu as créé un « gut feeling » (The Brand Gap – Marty Neumeier), un ressenti vis-à-vis de ton travail.
Même si tu n’as pas travaillé consciemment sur ton branding (peu le font, bien du moins, dès le début), tu as quand même ancré chez ton audience une image de toi, de ta marque, de par ce que tu dégageais naturellement.
Et l’un des facteurs qui font la force d’une marque ?
C’est la cohérence (je te renvoie à The Brand Gap à nouveau).
Beaucoup de créateurs, lorsqu’ils veulent scaler, se mettent à utiliser des stratégies et des méthodes marketing qui ne sont pas alignées avec les valeurs de la marque qu’ils ont créée.
Par exemple, c’est ce formateur qui a passé son temps à marteler à son audience que « la pub, c’est le diable », et qui se met à inonder les plateformes avec ses campagnes.
C’est ce Youtubeur qui insultait ses concurrents qui faisaient des placements de produits, et qui se met à faire la promo de produits bidons à la seconde où on lui propose un contrat un peu juteux.
C’est Marketing Viscéral qui se met à faire des petits produits en 1h, à – 70% jusqu’à 23h59.
Il n’y a pas de cohérence, et la marque en pâtit.
Une fois encore : bonne décision à court terme, mauvaise décision à long terme.
Si demain, je sortais une petite méthode magique sur une technique marketing, à 60€ au lieu de 200€, je ferais certainement un carton (quoique, sur mon audience hyper sélectionnée, pas sûr).
Mais ma marque en pâtirait, je passerais pour un opportuniste (ce serait le cas). Parce que les valeurs de ma marque sont à l’opposé de ces méthodes.
Et donc à long terme, je serais perdant.
Une marque puissante est supérieure à n’importe quelles méthodes de persuasion (en 2021, je suis convaincu que brand marketing > direct response. Les deux ne sont pas pour autant incompatibles. On en reparlera).
Donc l’idée, c’est d’être le plus au clair possible avec les valeurs, la philosophie et les limites de ta marque, et de prendre tes décisions en cohérence.
En optimisant pour l’image de ta marque à long terme, plus que pour les opportunités à court terme.
Dans le mail de demain ?
Je vais te présenter un de mes clients, Mathias, avec qui on a fait un excellent travail de positionnement et de branding justement.
Ce qui lui a permis, comme tu le verras, de se sentir beaucoup plus aligné dans son business aujourd’hui, tout en franchissant de nouveaux paliers.
Passe une excellente journée !
— Jean-loup
PS : n’hésite pas à répondre à ce mail si tu as des réflexions ou des questions à partager avec moi. Ou tout simplement pour me parler de ce que tu fais, d’où tu en es dans ton business et de ce que tu souhaites réaliser cette année. 😉